Mihai Șora: Ceea ce se cere pentru Basarabia se refuză Transilvaniei
L’Express – Decembrie 1990 (săptamâna 7 – 14)
Roumanie: Les vieilles ficelles du pouvoir
Faute de veritable dessein, Iliescu joue, comme son predecesseur, la fibre nationaliste.
Le choix de la date en dit long. La fete nationale roumaine se celebre desormais le l-er decembre, anniversaire du rattachement de la Transylvanie, vote en 1918 â Alba Iulia. C’est la que, samedi dernier, sur fond de ferveur chauvine, le chef de l’Etat, Ion Iliescu, a souhaite voir «tous Ies Roumains retrouver leur mere patrie». Pour l’occasion, le president elu, si police hors frontieres, n’a pas craint de s’afficher au cote de Radu Ciontea, leader de l’organisation fascisante Vatra Romaneasca et chantre de la «Grande Roumanie». En clair, partisan de la resti-tution de la Bessarabie et de la Bucovine du Nord, attribuees en 1940 â l’URSS. Comme hier Ceausescu, le pouvoir mise sur l’exutoire naţionaliste. «Iliescu est incoherent, juge son ex-ministre de l’Education, Mihai Sora, president de la toute jeune Alliance Civique [opposition] : il clame au sujet de la Bessarabie ce qu’il recuse pour la Transylvanie.»
Ballottee par l’Histoire, cette derniere, ou vit une minorite hongroise de 2 millions d’âmes, reste un redoutable foyer de tensions. Andras Suto en sait quelque chose. Sauvagement agresse lors des affrontements de Tîrgu Mureş — 5 morts et plusieurs centaines de blesses en mars dernier — l’ecrivain de souche magyare a perdu un oeil. A son retour de Boston, ou les chirurgiens tenteront de sauver le second, il compte regagner sa ville. «Avec une profonde angoisse, confie-t-il â L’Express. Mais c’est ma terre, ma vie. Depuis mars, les Hongrois fuient par milliers. Plus encore que sous Ceausescu. Si je pars, tous me suivront. Je suis leur dernier espoir.»
Jamais en retard d’une outrance, la presse acquise aux activistes de Vatra, souvent lies â l’ancien regime, accuse Suto de fomenter des troubles ethniques. Comme elle accable Laszlo Tokes ou Doina Cornea. Parmi leurs procureurs les plus feroces, Eugen Barbu, hier propagandiste zele des Ceausescu, aujourd’hui plume de fiel de «România Mare», hebdo-madaire miraculeusement j epargne par la penurie de papier. Le quotidien « România Libera » ou « 22 », la revue du Groupe de dialogue social, n’ont pas cette chance. Pas plus, semble-t-il, que la commis-sion d’enquete sur Tîrgu – Mureş : son rapport n’a jamais ete publie. Dans ce contexte empoisonne, seuls quelques intellectuels preservent le dialogue entre communautes. Car il n’y a guere â attendre des Etats eux-memes. Dire que Bucarest suggere d’heberger une commission vouee â l’apaisement des differends entre les minorites! Pour en pousser les membres au suicide ?
Vincent Hugeux ■
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